« Gaulois, une expo renversante » à la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris

Par Aliénor Lavergne

L’exposition propose aux petits et aux plus grands de partir à la découverte d’un peuple étonnant à travers une approche historique et archéologique des Gaulois. Ceux-ci sont connus dès le IVe siècle av. J.-C., au début du « Second âge du fer » dit période de « La Tène ». Ces peuples celtes se sont établis dans les territoires français, belges, suisses et nord-italiens actuels. L’exposition invite à une découverte de leur culture et de leur mode de vie.

L’exposition s’organise en plusieurs thématiques permettant au visiteur de découvrir différents aspects du peuple Gaulois à travers leurs représentations au fil des deux derniers millénaires, la découverte de l’organisation de leur société et de leurs us et coutumes ou encore l’observation et l’étude des restes exhumés lors des fouilles archéologiques.

Fig. 1 : Vue aérienne des vestiges d’une ferme gauloise. © Maurice Gautier.
Fig. 1 : Vue aérienne des vestiges d’une ferme gauloise. © Maurice Gautier.

Figure 1 : Vue aérienne des vestiges de la ferme gauloise de Lauban à Kerfourn (Morbihan). Le tracé des clôtures, d’anciens fossés aujourd’hui comblés, ressortent sous la forme de marques plus sombres, les plantations ayant bénéficié d’une terre plus humide à cet endroit.

 

 2 000 ans d’imaginaire gaulois

Dès l’entrée, on peut suivre sur les derniers 2000 ans, l’évolution des mentalités par rapport aux Gaulois. L’imaginaire collectif évoluant au fil du temps, leurs représentations reflètent la perception de chaque génération. Vers le Moyen-Âge, ce peuple était peu recommandable puisque vaincu et donc plutôt oublié, les rois de France se considérant descendants des Francs. L’exposition nous amène à découvrir des peintures de Gaulois vus par eux-mêmes puis vus par les autres.

Fig. 2 : Photo de statuettes de Paule. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Fig. 2 : Photo de statuettes de Paule. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

Figure 2 : Photo de statuettes anthropomorphes trouvées sur le site de Paule, Côtes d’Armor (site d’une résidence aristocratique). Fin du IIe s. av. J.-C. Ces sculptures représentent vraisemblablement les bustes des ancêtres des aristocrates qui ont vécu sur le site. Celle qui tient une lyre peut représenter également un barde.

Vers le XVIe siècle, les Gaulois renaissent dans les esprits sur fond de guerres de religion et sont réhabilités dans l’imaginaire collectif. Mais vers les XVIIe et XVIIIe siècles, ils sont de nouveau mal considérés car perçus comme barbares, grossiers et incultes.

Fig. 3 : « Le Courage gaulois ». Cliché : A. Lavergne.
Fig. 3 : « Le Courage gaulois ». Cliché : A. Lavergne.

Vers le XIXe siècle, le peuple sortant de la révolution recherche des ancêtres communs avec lesquels s’identifier : les Gaulois signent leur retour dans les esprits. Vers 1830, les quatre vertus du peuple français : « courage, génie, générosité et constance » sont retrouvées dans la figure des Gaulois. Vercingétorix devient alors le gaulois idéal et symbolise la nation. C’est à cette période, vers 1850, que Napoléon III décide d’initier des fouilles archéologiques gauloises pour vérifier ce que rapporte la source écrite de la Guerre des Gaules de César : les fouilles ont lieu à Alise-Sainte-Reine, à Gergovie, au Mont Beuvray-Bibracte, à Vichy, à Uxellodunum, ainsi qu’à Compiègne. Le Gaulois est dans l’air du temps : un quotidien, Le Gaulois, sort en 1868.

Figure 3 : François Pascal Simon, baron Gérard (1770-1837), Le Courage Guerrier ou le Courage gaulois, huile sur toile, 1830, musée des châteaux de Versailles et de Trianon, Versailles.

Entre 1870 et 1914, les Gaulois sont au service de la patrie, une « Marche Lorraine » est créée en 1892. La figure de Vercingétorix trône au-dessus de tombes de combattants morts pour la France pendant la première Guerre Mondiale. Entre 1940 et 1944, les Gaulois sont aux couleurs de Vichy, des affiches des Chantiers de la jeunesse de 1942 arborent des Gaulois. Ainsi, durant la période 1881-1962, les Gaulois sont acclamés comme ancêtres pour tout l’Empire de France. Astérix et Obélix deviennent l’image de marque des Gaulois à partir de 1961 et ce, jusqu’à nos jours… L’intérêt croissant porté à ce peuple au cours du dernier siècle relance à la fois les fouilles archéologiques et la recherche scientifique dans ce domaine.

 De la fouille archéologique aux laboratoires

Reconstitution des fouilles archéologiques. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution des fouilles archéologiques. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

La découverte parallèle de techniques opératoires et d’une diversité de disciplines scientifiques mobilisées par l’archéologie contemporaine est abordée à la suite de l’exposition : deux terrains de fouille et sept ateliers sont présentés aux visiteurs.

Tombe d’incinéré avec dépôt d’offrandes. (Panneau de l’exposition. © CSI/A. Robin.)
Tombe d’incinéré avec dépôt d’offrandes. (Panneau de l’exposition. © CSI/A. Robin.)

En s’appuyant sur les vestiges et traces provenant de la période gauloise retrouvés sur le terrain, l’archéologue a pu reconstituer la nature et la culture de ce peuple : les Gaulois étaient de grands agriculteurs, ils cultivaient blé, orge, épeautre, lentilles, fèves, caméline… L’exposition est disposée de façon à ce que les différentes activités ludiques proposées pour petits et grands permettent de mieux les connaître : le visiteur devient acteur et endosse le rôle de l’archéologue dans ses différentes spécialités.

Tombe d’inhumé avec dépôt d’offrandes. (Panneau de l’exposition. © CSI/A. Robin.)
Tombe d’inhumé avec dépôt d’offrandes. (Panneau de l’exposition. © CSI/A. Robin.)

Des espaces aménagés selon des thématiques facilitent la découverte de différents aspects de leur culture : leurs maisons, leurs animaux, le travail des métaux, des poteries et des céramiques… Le développement de l’archéologie aérienne a permis de retrouver les traces des constructions gauloises. Cette civilisation était composée d’une mosaïque de plus de soixante peuples différents et de langues différentes.

Céramique avec « caramel alimentaire ». © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Céramique avec « caramel alimentaire ». © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

Des dépôts organiques carbonisés, des macro-restes alimentaires dits « caramel alimentaire » ont permis à l’archéologue de déterminer ce que les Gaulois mangeaient, la manière dont ils cuisinaient ou l’usage qu’ils faisaient des poteries.

Initiation à la fouille archéologique. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Initiation à la fouille archéologique. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

Les petits visiteurs sont invités à s’initier aux techniques de fouille et peuvent avoir en main de véritables outils, utilisés par les archéologues. Ainsi le travail d’exhumation d’objets archéologiques leur est enseigné et leur donne une première approche de ce qu’implique la reconstitution d’une civilisation. Ils peuvent appréhender les difficultés rencontrées par les professionnels et mettent au jour des vestiges gaulois.

 

 De la fouille au musée : des objets authentiques et des reconstitutions de tombes et d’un sanctuaire

Fig. 11 : Casque-cygne. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Fig. 11 : Casque-cygne. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Fig. 10 : Copie du calendrier de Coligny. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Fig. 10 : Copie du calendrier de Coligny. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Fig. 9 : « Sanglier-enseigne ». © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Fig. 9 : « Sanglier-enseigne ». © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

Divers objets archéologiques retrouvés lors des fouilles sont exposés dans cette partie de l’exposition : carnyx en bronze (instrument de musique qui par son aspect visuel et par sa sonorité devait contribuer à effrayer l’ennemi), casque-cygne datant du IVe-IIe siècle av. J.-C., copie du calendrier de Coligny en langue gauloise, objet en bronze nous renseignant sur la conception que les Celtes avaient du temps et sur leurs connaissances en astronomie (original exposé au Musé gallo-romain de Fourvière), copie du chaudron celtique de Gündestrup retrouvé dans une tourbière au Danemark, seau à décoration en bronze, lance-bannière de Thugny-Trugny, fac-similé du sanglier-enseigne de Soulac-sur-mer en laiton, daté du Ier siècle av. J.-C., statuettes de Paule et vases peints gaulois du IIe siècle av. J.-C., etc.

Figure 9 : Fac-similé de « sanglier-enseigne », Soulac-sur-mer. Laiton ; Ier siècle av. J.-C.

Figure 10 : Copie du calendrier de Coligny, plaque de bronze du IIe s. ap. J.-C. trouvée à Coligny (Ain), dont les inscriptions en langue gauloise couvrent une période de 5 années. Original conservé au Musée de la civilisation gallo-romaine, Lyon.

Figure 11 : Casque-cygne appartenant au trésor (dépôt exceptionnel d’objets) du site de Tintignac, Naves (Corrèze). D’après les commentaires de Christophe Maniquet, responsable des fouilles Inrap, et Monique Drieux Daguerre, du laboratoire Materia Viva, il s’agit d’un type de casque totalement inconnu à ce jour dans le monde celtique. Son cou constitue une corne frontale retournée vers le couvre-nuque qui figure la queue de l’oiseau.

 

Reconstitution d’une tombe d’artisan. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution d’une tombe d’artisan. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution d’une tombe de femme et d’enfant. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution d’une tombe de femme et d’enfant. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

Des reconstitutions de tombes de personnes de statuts différents montrent bien les différences de considération sociale : on peut découvrir les reconstitutions des sépultures d’un artisan, d’une femme et d’un enfant, d’un esclave et d’un aristocrate tels que découvertes lors des fouilles.

Reconstitution d’une tombe d’esclave. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution d’une tombe d’esclave. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution d’une tombe d’aristocrate. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.
Reconstitution d’une tombe d’aristocrate. © CSI/A. Robin. Cliché : A. Lavergne.

Ces scènes permettent de recréer certains aspects des sépultures utilisées à l’époque et s’appuient sur des éléments matériels exhumés. L’objectif principal est la réalisation d’une médiation culturelle des coutumes antiques à l’égard du grand public.

 

 Film et fin de l’exposition

Un film est diffusé à la fin de l’exposition retraçant l’aventure d’un gaulois aristocrate de Lotos alors qu’il se prépare pour un voyage important à Bibracte, capitale du peuple des Éduens. Le quotidien d’un personnage vivant à l’époque des Gaulois est ainsi reconstitué et permet aux visiteurs de s’imprégner de tous les éléments présentés au cours de l’exposition.

 

 Conclusion

La visite de l’exposition « Gaulois, une exposition renversante » se fait principalement en famille et permet d’aborder le peuple Gaulois d’une manière ludique et pédagogique. Les plus petits s’essayeront aux techniques archéologiques tandis que les plus grands pourront découvrir un nouveau visage de ce peuple si « renversant » qui n’a pas fini de nous surprendre.

L’exposition est temporaire et accessible jusqu’au 2 septembre 2012. Elle est particulièrement recommandée puisqu’elle allie histoire et recherche archéologique sur les Gaulois et constitue une première initiation à l’archéologie pour le grand public. La difficulté pour l’archéologue de retranscrire et de reconstituer à partir des objets exhumés tous les aspects de cette société dans le temps (chronologie), dans l’espace (son territoire de peuplement), dans son économie, dans son organisation socioprofessionnelle, dans ses savoirs, dans ses croyances… est mise en évidence. N’hésitez pas à y faire un tour mais attention, l’exposition est très demandée donc n’oubliez pas de réserver votre place sur Internet…

 

 Coordonnées

Exposition temporaire organisée par la Cité des Sciences et de l’Industrie en partenariat avec le Ministère de la Culture et de la Communication et en coproduction avec l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), du 19 octobre 2011 au 2 septembre 2012.

Lieu : Cité des Sciences et de l’Industrie, 30 avenue Corentin Cariou, 75019 Paris.

Horaires : du mardi au samedi de 10h à 18h et le dimanche de 10h à 19h.

Voir le site de l’exposition : www.cite-sciences.fr

 

 Bibliographie

  • LANTIER Raymond, Recherches archéologiques en Gaule en 1947, IN Gallia, Tome 6, fascicule 2, 1948, p. 425-468.
  • BRUNAUX Jean-Louis, Les Gaulois, Guide Belles Lettres, Paris, 2005.
  • Dossier de presse de l’exposition Gaulois, une expo renversante, Paris, 2011.
  • Qui étaient les Gaulois ? Catalogue de l’exposition « Gaulois : une expo renversante » présentée à la Cité des sciences et de l’industrie, Universcience Éditions/Éditions de la Martinière, Paris, 2011.

Aliénor Lavergne
ENS 2ème année, 2012